//FOCUS SUR : LA GESTION DES BIDONVILLES DE BOMBAY

En tête Bombay Laloobhai

En juin, le Magazine Géo publiait un article sur les nouveaux bidonvilles à la verticale de Bombay. Au début de l’été, c’est au tour de Courrier International de publier un article dans la rubrique 360° sur Hafeez Contractor, le « Starchitecte de Bombay ». Ces deux articles relatent un même fait : la politique de transformation des bidonvilles de la capitale économique de l’Inde qui est aussi la 6ème plus grande ville du pays, et sa gestion de la richesse et de la pauvreté. Actuellement le pays est la 8ème puissance mondiale, de nouvelles réalités se jouent donc sur ce territoire où la misère y est extrême.

Le premier article se penche sur les nouvelles conditions de vie des habitants des bidonvilles et le second sur ceux qui imposent ces nouvelles conditions aux premiers. L’acteur incontournable de ces changements est Hafeez Contractor le « Starchitecte de Bombay », un homme riche et célèbre considéré comme le créateur de l’Inde contemporaine. Un homme mégalomane qui joue le jeu des politiques pour construire les projets les plus extravagants au cœur des bidonvilles où logent 60% de la population de Bombay. D’après lui sa démarche est sociale, ses constructions vendues au prix du marché permettent de faire pousser des tours pour reloger les habitants des quartiers informels gratuitement. Or ces nouvelles constructions sont sans qualités et vétustes avant l’heure, les distributions d’eau y sont absentes, les logements font 29m² quelque soit la taille de la famille, et ne correspondent pas du tout aux pratiques de ceux qui y habitent, mais surtout, ces nouvelles barres sont déplacées en périphérie de la ville. Toute l’organisation sociale, économique, religieuse est alors bouleversée pour ceux qui sont déplacés. Les habitants perdent les réseaux informels qui leur permettaient de survivre en raison de l’isolement de leur nouvelle résidence (situation géographique et absence de transports). On appelle ces nouveaux quartiers « les bidonvilles verticaux ». La plupart des habitants préfèrent sous-louer leur logement et partir s’installer dans des bidonvilles au cœur de la ville.

Cette démarche n’est donc pas sociale, elle relève d’une logique de façade qui permet aux structures du pouvoir traditionnelles que sont « mafias, politiciens et bureaucrates » comme l’explique l’urbaniste Prasad Shetty de pouvoir spéculer et privatiser des parcelles immobilières de premier choix en y installant des buildings luxueux souvent inhabités.

Bombay ne répond donc pas à la crise du logement qui sévit plus largement dans le pays – n’oublions pas que ce sont 300 millions de personnes qui vivent sans électricité en Inde – mais elle préfère répondre aux plaisirs du secteur privé. Le vrai objectif du plus grand architecte du pays est en fait de proposer aux riches des modes de vie à l’occidentale sans avoir besoin d’émigrer, en leur offrant la possibilité de piloter leur société depuis le pays et non plus depuis New York ou Londres. Encore une fois, l’architecte devient le pantin de l’Etat.

//APG

Image d’en-tête: Les logements dit « sociaux » dans le quartier de Laloobhai à Bombay livrés en 2009 sont déjà insalubres. Crédit Photo Alain Buu

Le petit son de l’article: Janis Joplin – « Summertime »

 

 

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2 réflexions sur “//FOCUS SUR : LA GESTION DES BIDONVILLES DE BOMBAY

  1. Je me demande s’il n’y a pas un lien entre ce que tu décris et ce qui s’est pratiqué dans nos jolies ville de province dans la seconde moitié du siècle dernier.
    Les vieux cœur de ville ont été vidés de leur population « pauvres » et réhabilités en logement pour bourgeois amateurs de vieilles pierres…

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