// AIRBNB – HALTE AUX DÉRIVES

Airbnb Site et CIté Halte aux dérives

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APG en a déjà parlé la semaine dernière, mais le sujet est d’actualité avec les grandes vacances qui commencent. Quelles que soient vos préférences, voyages culturels dans les capitales européennes, détente en campagnes ou farniente en bords de plage, vous avez peut-être réservé ou été tentés de réserver votre hébergement sur Airbnb. Airbnb est partout, incontournable !

Que vous soyez un adepte du site ou un novice en la matière, vous savez certainement que le système de location entre particuliers fait débat en ce moment. Changement de population dans les quartiers touristiques des grandes villes, envolée du prix de l’immobilier, concurrence déloyale envers les hôteliers professionnels, les dérives conséquentes à l’activité d’Airbnb soulèvent des critiques.

Pour faire le point sur le sujet, je vous renvoie à un numéro très intéressant de Un Jour en France, l’émission de France Inter, qui recevait début juin autour du micro de Bruno Duvic, le directeur Europe et Afrique d’Airbnb, Olivier Grémillon, et l’Adjoint à la Mairie de Paris en charge du logement, Ian Brossat. Le sujet, vous vous en douterez, traite non pas des vacances idylliques que vous pourrez passer en profitant du site (Paris, Rome, Berlin, choisissez votre destination), mais plutôt des problèmes que posent la proposition de locations entre particuliers d’Airbnb sur l’offre de logements d’une ville.

 

THE PLACE TO BE

Pour mieux comprendre l’explosion des colères envers Airbnb, il faut reprendre un instant l’origine du projet et se rappeler la jeunesse de la société -8 ans seulement. Le site a ouvert en 2008 et propose le service suivant : créer une plateforme d’échange et connecter des particuliers du monde entier qui souhaitent louer leur appartement pendant leurs congés. Le commerce n’est pas nouveau et vogue sur la mode de l’économie collaborative dite « économie du rien », qui fait valoir des services et des biens dormants à celui qui les possède contre un prix réduit pour celui qui souhaite consommer. L’échange ne se base pas sur un produit créé pour le commerce, mais se fonde sur la confiance et le partage, dans une rentabilité donnant-donnant et un esprit plus social.

Ca, c’était le début. Vous pouviez louer un appartement ou une chambre libre à un moment où celui-ci était disponible. L’arrangement du commerce était laissé au libre arbitre des participants : prix, longueur du séjour, logistique pour le passage des clés, services annexes etc … Airbnb n’a rien inventé du concept de location entre particuliers mais mis en service une plateforme perfectionnée pour mettre en relation les loueurs et les locataires. Par son interface, le site a mis en avant un service existant (dirai-je séculaire ?), a doré ses galons par le biais d’une plateforme ludique, chic et cool, dans l’air du temps et l’effet de mode a pris.

Aujourd’hui, la petite start-up est devenue grande et pèse 25 milliards de dollars (je répète : 25 milliards de dollars). Avant d’analyser les effets d’Airbnb sur le commerce du tourisme et l’offre de logement dans les grandes villes, nous pouvons nous demander si les détracteurs d’Airbnb ne sont pas simplement jaloux d’un tel succès. Une idée piquée au panier, quelques lignes de code et un design stylé, et hop, vous voici à la tête d’un empire du web et du monde. Airbnb, Blablacar, Uber, Leetchi, ces entreprises ont réussi en quelques années à se placer en leader sur leur marché en n’inventant aucun contenu nouveau. Ne serait-ce pas une raison suffisante pour créer de la convoitise et la rancune ? Ajoutez à cela, que ces empires ont été créés par des entrepreneurs jeunes, très jeunes … (pour rappel, Brian Chesky et Joe Gebbia, les fondateurs d’Airbnb ont 32 ans, Mark Zuckerberg de Facebook a 35 ans …)

Ce petit aparté historique et contextuel de la création d’Airbnb a pour objectif de dresser le décor qui encadre le développement du marché d’Airbnb. Nous parlons ici d’une activité qui s’est développée à une vitesse fulgurante, bouleversant l’économie du tourisme par sa concurrence (arrivée d’une nouvelle activité) et la croissance exponentielle de son flux. Les méthodes entrepreneuriat des start-up du web et la rapidité avec lesquelles elles commercent et se développent, perturbent une bulle économique qui s’agite alors pour retrouver un équilibre. La bulle concerne le monde juridique, les institutions de contrôle et le corps législatif qui tentent tous de se raccrocher au bateau et d’encadrer l’activité.

Infogrphie Airbnb dérive halte Site et CIté

How airbnb started – Infographie d’Anna Vital

 

LES DÉRIVES

Au profit d’un succès, abondent ceux qui veulent le détourner et utiliser le système à leur propre intérêt. Airbnb devient alors la cible des attaques et soulève les critiques de ceux qui en sont victimes. Au premier plan, les hôteliers mécontents de la concurrence déloyale qu’Airbnb et les loueurs s’octroient. Pour un service de plus en plus équivalent, il n’est pas demandé les mêmes exigences d’un point de vue réglementaire ou financier (paiement des charges et des taxes). Au second plan, les villes victimes de leur attraction touristique. L’opportunité financière de louer des appartements ou des chambres en plein cœur des centres villes à une masse de touristes toujours en demande, pousse certaines personnes à retirer leurs biens du marché de la location longue durée pour des locations de séjours courts, voir à transformer des immeubles en hôtel clandestin.

La conséquence est immédiate pour les grandes villes : une hausse du prix de l’immobilier, un effondrement de l’offre de location à l’année et une ambiance urbaine différente. Désormais certains immeubles des quartiers prisés n’accueillent plus d’habitants locaux. Les natifs des métropoles sont contraints de s’exiler des quartiers de centre-ville au profit des touristes. Ce sont pourtant eux qui font vivre les villes, construisent leurs identités, participent à l’économie locale. Le problème est d’ampleur et les villes prennent très au sérieux le souci de limiter ces dérives. Berlin a commencé les mesures en interdisant depuis mai 2016, la location de meublé touristique de logement entier. La Mairie de Paris a quant à elle mis en place l’obligation de demander l’autorisation à la Mairie avant de proposer un appartement en location meublé. La régularisation est le maître mot, non pas pour empêcher un honnête propriétaire de faire valoir son bien et ses périodes d’absence (dans la limite de 4 mois par an pour une résidence principale), mais pour contrer les multi-propriétaires qui abusent du système.

Sur ce sujet, je vous renvoie à l’émission qui développe bien les enjeux d’un encadrement responsable de l’activité pour lequel se bat Airbnb et les municipalités. Comme les chiffres ont en effet d’accroche marquant pour souligner les dangers d’une dérive, en voici quelques uns : à Paris, 50 000 annonces proposent une location sur le site Airbnb, on en compte 250 000 en France. 8 millions de français ont déjà utilisé Airbnb, dont 5 millions en 2015. En faites-vous partie ?

 

Si je vais le bilan de mon année, j’ai utilisé le site à 3 occasions, pour un weekend à Berlin, un weekend à Rome et mes prochaines vacances en famille près d’Arcachon. Lors de deux séjours déjà exécutés, je n’ai pas eu l’impression de prendre place dans un logement privé et vivant. La décoration et l’ameublement étaient propres et suffisants pour un weekend, mais je n’ai pas retrouvé la personnalité d’un logement qui vit et qui est aimé par des propriétaires habitant en longue durée.

Lors de ces weekends, j’ai eu la chance de profiter d’un système efficace : prix raisonnables, échanges et contacts en direct par chat avant le séjour, flexibilité sur les horaires pour la possession de lieux et le check-out, bonne emplacement en ville et charme d’un logement in-situ … Je ne pourrais pas dire que je n’ai pas apprécié mes weekends (oh non) ni les avantages d’Airbnb, mais j’ai eu le sentiment de participer à un système, qui englobait davantage que mon séjour et m’alertait sur nos responsabilités individuelles.

En tant qu’utilisatrice récidiviste, je ne me permettrais pas de juger les modes de consommation de vacances et de tourisme des uns et des autres. Mais j’espère toutefois que, comme moi, cette émission vous fera réfléchir.

Un jour en France – Airbnb, une nouvelle façon de vivre ses vacances. A écouter sur France Inter ou où vous voulez en podcast !

// CDu

 

Pour aller plus loin :

Comment Airbnb a repensé la confiance par le design, conférence TED de Joe Gebbia, filmé en Février 2016.

Airbnb et San Francisco, Airbnb et Berlin, chaque ville cherche sa défense et tentent de sauvegarder son offre de logements longue durée.

 

Le petit son de l’article : Rural Alberta Advantage – « Frank AB »

 

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